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Les Vikings et leurs incursions en Flandre au IXe siècle

  • Photo du rédacteur: Lézard Amusé
    Lézard Amusé
  • 19 nov. 2020
  • 6 min de lecture

Lézard Amusé vous retrouve aujourd'hui pour la partie 2 sur la présence des Vikings en Francie ; cette fois sur les incursions en Flandre et plus largement dans nos actuels Hauts-de-France.


La lecture du premier article n'est pas nécessaire pour comprendre cette partie 2, donc pas de panique si vous ne l'avez pas lue.


Tout d'abord, il est intéressant de noter qu'on trouve peu de sources sur la présence des Vikings en Flandre, les ouvrages se concentrant surtout sur des déplacements généraux ou sur les moments importants comme le Siège de Paris ou l'installation des futurs Normands en Normandie.

C'est pourquoi nous revenons aujourd'hui sur la chronologie des déplacements vikings en Flandre, peu connus, ne citant que les éléments pertinents pour comprendre le phénomène.



Chronologie des incursions vikings en Flandre



Les invasions en France au IXe et Xe siècle

Le littoral de Flandre a été très touché par les raids. Il n'a pas été le but premier des attaques vikings mais ce large estuaire leur a permis d'accéder aux fleuves (l'Aa, l'Yser ou encore l'Escaut) longeant les riches abbayes et villes épiscopales de la région.

Une fois dans les terres, le réseau de routes antiques leur a offert de nombreuses possibilités pour profiter des richesses de la région.

A terre, ils raflaient ou achetaient des chevaux pour aller dans les zones inatteignables en bateau. Il semble qu'ils soient passés d'Arras à Gand, puis à Courtrai et à Condé-sur-l'Escaut, près de Valenciennes.

* Le terme de "normand" n'est pas correct sur cette carte car il désigne une réalité postérieure. Le terme de Scandinave ou même Viking est préférable.


Comme nous l'avons vu la semaine dernière, Charlemagne renforce dès 800 le littoral en installant une flotte. Voyant la menace se rapproche, il ordonne en 820 la construction de bateaux à Boulogne et Gand, et les phares étaient beaucoup utilisés pour communiquer par signaux.


Des incursions danoises surviennent sur la côte flamande en 842 mais sans succès.

La même année, on peut tout de même noter le ravage qui a lieu à Quentovic, port de commerce important et propriété de Charlemagne, situé à l'embouchure de la Canche.


Routes commerciales vers Dorestad.

Vu leurs cibles, on remarque bien qu'ils étaient attirés par l'argent des marchands, des monastères et le trésor des églises. En 843, les Danois pillent la Frise et notamment le port de Dorestad, un des plus importants de l'époque. En 850, certains hommes du Viking Danois Rorik, connu pour avoir conquis Dorestad et Utrecht (actuels Pays-Bas), envahissent la Flandre et notamment le pays de Thérouanne (proche de Saint-Omer.

En 851, les Vikings remontent l'Escaut jusqu'à Gand (actuelle Belgique).


S'en suit une accalmie jusqu'en 860 où des Scandinaves, après avoir été chassés d'Angleterre, débarquent près de l'embouchure de l'Yser. L'abbaye de Saint-Winoc à Bergues est détruite.


Ils se retrouvent à nouveau sur la côte flamande en 864 mais la résistance se fait plus forte, sans doute grâce au 1er comte de Flandre Baudoin Ier. Ils finissent par se retirer dans la vallée du Rhin.


En 879, après une accalmie de 15 ans, des Scandinaves sont chassés par Alfred le Grand, roi des Anglo-Saxons, et profitant de la mort de Baudoin Ier passent par la côte, entre Boulogne et Calais.

Ils remontent vers le nord par la Lys et l'Escaut détruisant encore une fois de nombreux monastères avant de se diriger vers le Brabant.


Cloître de l'abbaye de Saint-Bavon à Gand, délaissée au XVIe s.

Ils hivernent à Gand dans l'abbaye de Saint-Bavon et dès 880 ils s'attaquent à Tournai puis franchissent l'Escaut et pillent le diocèse de Noyon et ses alentours.

Pendant cette période, ils vont faire beaucoup d'allers-retours entre l'Escaut, la Somme, l'Aa et la mer.

On remarque bien qu'à partir de 880, les Vikings vont préférer passer l'hiver ici plutôt que rentrer. Ils s'installent notamment dans les monastères désertés.


En 881 et en 883, de nombreuses destructions marquent Saint-Amand, mais celles-ci ne sont pas décisives.

En 881, les Vikings investissent la région côtière comprise entre Boulogne et l'abbaye de Saint-Riquier et Saint-Valéry. Cette même année marque la première défaite des Vikings face au roi Louis III à Saucourt-en-Vimeu, dans la Somme actuelle. Puis la Flandre connaît une accalmie de 9 ans.


En 891, le littoral flamand est à nouveau pillé : les Scandinaves s'attaquent à Thérouanne, Saint-Omer et à l'abbaye de Saint-Bertin. Ils marchent ensuite sur Cassel et les autres villes récentes de la région. Finalement, ils quittent le Westhoek pour Liège et Louvain. Et enfin, en 892, ils quittent le pays par Boulogne pour l'Angleterre.

(région transfrontalière belgo-française située dans la province de Flandre-Occidentale, entre la mer du Nord et les fleuves de la Lys et de l’Aa.)


Avec cette chronologie, on remarque bien que les attaques sont épisodiques et se concentrent surtout au IXe siècle.



La réaction des populations et des autorités locales


Fuir ou résister ? Telle était la question.

Il est intéressant de rappeler que le pays n'avait plus connu d'invasions depuis un long moment déjà et avait perdu quelques notions de défense territoriale.


Peu avant 800, Charlemagne avait fait installer des garnitures flottilles mobiles pour surveiller les activités le long du flan nord ouest, plus précisément à Boulogne et à Gand. Les garnitures communiquaient grâce aux phares et s'envoyaient des signaux lumineux pour avertir du potentiel danger. Ce système a été renforcé en 835 et en 838.


Certains habitants ont tenté de se défendre, notamment en 891 à Cassel et à Saint-Omer. Mais ils ont souvent été dépassés par les événements, frappés par la supériorité des Vikings due à leur rapidité d'action et à leur grande mobilité.


Des fortifications ont été construites dans la région afin de bloquer le passage sur les cours d'eau mais aussi aux abords des églises et abbayes. Les comtes de Flandres ont dû jouer un rôle important dans la construction de ces lieux fortifiés.




Par exemple, Baudoin Ier a participé à la construction des fortifications érigées pour défendre Bruges avant 879. Plus largement, les populations locales ont édifié ce type de défense dans un grand nombre de villes comme Bourbourg, Bergues, Cassel, ou encore à Furnes (actuellement en Belgique). Ces fortifications, qui ont été intégrées aux places fortes déjà présentes, n'étaient pas tellement impressionnantes, et mesuraient environ 200 mètres de diamètre.






Les populations ont ainsi tenté de maintenir l'ennemi à distance mais quand les troupes étaient trop nombreuses, le premier réflexe était souvent celui de la fuite, par peur du feu, de la mort ou d'un enlèvement. Les moines ont souvent été les premiers à fuir et s'installer dans des abbayes plus lointaines.


Et parfois, il arrivait que les populations nouent des relations avec les Scandinaves, comme les marchands d'armes.



Les conséquences des raids vikings sur la Flandre


--> Conséquences économiques et sociétales


Les écrits monastiques sont plein de meurtres, d'enlèvements, d'incendies et de pillages commis par les affreux païens envoyés, selon eux, par Dieu pour punir de leurs péchés les Francs. Ces écrits ont fait émerger dans l'esprit des populations l'angoisse et la crainte de ces incursions. Il est vrai que les raids vikings étaient violents, choquant par leur rapidité d'exécution, mais ils étaient aussi très épisodiques dans la région : en 820, 860, 864, 879-81, 883, puis 891-92 pour résumer.


Les destructions n'étaient pas définitives mais la reconstruction était lente, faute de personnes pour accélérer le processus. Par exemple, après la dernière attaque qui a ravagé l'abbaye de Wormhout, celle-ci est resté en l'état et les moines sont partis s'installer dans le Groenberg, colline isolée de Bergues.

Aussi, ces incursions ont épuisé la région, laissant parfois des terres incendiées, dépeuplées par la fuite et par la faim.


Mais, il faut aussi remarquer l'essor économique qui a lieu après l'an mil, notamment amorcé dès le 9e et le 10e siècle. En effet, les villes fortifiées résistantes aux attaques vikings ont joué un rôle sur le plan économique en attirant les négociants en quête de sécurité pour leurs biens et pour eux-mêmes. De nombreux bourgs et leur marchés ont vu le jour, créant parfois les plus anciennes agglomérations urbaines encore existantes aujourd'hui comme Bergues ou Bourbourg.

De plus, les citadelles construites deviennent des centres importants de l'administration et de la justice centrales.



--> Conséquences politiques


Le climat d'insécurité a favorisé la naissance de la féodalité par le développement et le maintien de l'autorité au niveau régional.


Baudouin 1er, façade de l'hôtel de ville de Bruges

C'est dans ce contexte qu'apparaît le comté de Flandre. En effet, c'est Baudoin Ier, Bras de Fer qui fonda et développa le comté de Flandre en imposant son autorité dans cette région déstabilisée et fragilisée par les partages successifs de l'empire de Charlemagne mais aussi et surtout par les incursions vikings. L'incapacité de Louis II, roi de Francie occidentale de 843 à 876 à lutter contre les scandinaves a entraîné la montée en puissance des pouvoirs locaux ayant promis à la population une meilleure protection. Baudoin Ier semble notamment avoir mis en fuite les Vikings en 864.

A sa mort en 879, il a transmis sont autorité à son films Baudoin II, étendant son pouvoir de la mer du Nord à Courtrai et d'Aardenburg à Cassel.



En conclusion, on pourrait dire que les raids Vikings au IXe siècle ont profondément marqué la Flandre et toute la côte nord-ouest de l'Europe. Ces raids ont parfois rencontré une résistance de la part des populations locales, parfois non. Et un mouvement général de construction de fortifications s'est accéléré au cours du siècle, favorisant même les échanges commerciaux. Enfin, ce climat d'insécurité a profité à certains hommes politiques comme Baudoin Ier pour imposer son pouvoir et devenir comte de Flandre.

Finalement, même si la fréquence des raids était davantage épisodique, ceux-ci ont eu un impact durable sur la Flandre, positif comme négatif.



Cet article en deux parties sur les Vikings touche à sa fin. Lézard Amusé espère qu'il vous aura plu et vous retrouve la semaine prochaine !


 
 
 

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