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La bataille d'Azincourt : un épisode tragique de la guerre de Cent Ans

  • Photo du rédacteur: Lézard Amusé
    Lézard Amusé
  • 16 juil. 2020
  • 7 min de lecture

Dernière mise à jour : 17 juil. 2020

La guerre de Cent Ans (1337-1453) fut l’un des conflits les plus importants du Moyen Âge, opposant pendant près de 116 ans les rois de France (de la dynastie des Valois) à ceux d’Angleterre (dynastie des Plantagenet et des Lancastre).

La première période de ce conflit est marquée par les victoires de l’Angleterre à l’occasion des batailles de Crécy en 1346 et de Poitiers en 1356. C’est pendant cette dernière que le roi Jean II dit le Bon (1319-1364) est fait prisonnier. Bertrand du Guesclin (1320-1380), noble breton et fait connétable de France par Charles V (1338-1380) en 1370, réussit à regagner la presque totalité des conquêtes anglaises.


Par la suite, la guerre civile opposant les Bourguignons et les Armagnacs entre 1407 et 1435 affaiblit considérablement le royaume de France. A l’origine de cette guerre, un conflit entre le duc de Bourgogne Jean Sans Peur (1371-1419) et son cousin Louis Ier, duc d’Orléans (1372-1407), ce qui mena à une lutte de pouvoir entre les deux branches cadettes de la dynastie des Valois. La défaite de la bataille d’Azincourt symbolise cette fragilité du pouvoir.


©British Library Harley MS 443, f.95
Christine de Pisan offrant un livre à Louis Ier, duc d'Orléans. Il porte à son cou le collier de l'Ordre du Porc Épic, qu'il a fondé

L’aide tant espérée de Jeanne d’Arc permet quelques années plus tard à la France d’enchaîner les victoires et de permettre au Dauphin, Charles de France (1403-1461) de se faire sacrer à la cathédrale de Reims en 1429, devenant ainsi Charles VII.



Un roi d’Angleterre assoiffé de conquêtes

Le 25 octobre 1415 restera gravé dans les mémoires. C’est ici, à Azincourt, que l’armée anglaise décima l’armée française, et avec elle la fine fleur de la chevalerie française… Elle reste l’une des mieux documentées avec de nombreux témoignages de contemporains ayant participé à la bataille ou qui en relatent le déroulement.


©National Portrait Gallery, Londres
Le roi Henry V d'Angleterre

Henry V devient roi d’Angleterre en 1413 à l’âge de 26 ans. Comme les monarques anglais qui l’ont précédé, il souhaite reconquérir le duché de Normandie, que la France détient depuis 1332, et obtenir le titre de roi de France, dont il clame être l’héritier, du fait de sa parenté avec le roi de France, Philippe IV Le Bel (1268-1314), dont il est l’un des descendants. De nombreuses négociations diplomatiques s’ensuivent de la part des français pour éviter de nouveaux conflits : proposition de mariage avec Catherine, la fille de Charles VI (une dote de 850 000 écus d’or avait été proposée par les conseillers du roi, la restitution de terres et de seigneuries importantes contre une démobilisation des hommes d’armes d’Henri V).

Malgré tout, le roi reste campé sur ses positions et demande par ailleurs les duchés d’Aquitaine, d’Anjou et de Touraine ainsi que plusieurs comtés qui faisaient auparavant partis de la couronne d’Angleterre. Dans une lettre du 10 août 1415, il met en garde une dernière fois son cousin Charles VI : « A noble prince Charles, notre cousin et adversaire de France, Henri, par la grâce de Dieu roi de France er d’Angleterre. A bailler à chacun se qui est sien est oeuvre de sage conseil. Ami, rend ce que tu dois, afin que le sang humain ne soit répandu. Est due la restitution des droits cruellement soustraits que tant de fois nos ambassadeurs ont demandés ».

Trois jours plus tard, le 13 août, près de 700 navires apparaissent le long des côtes normandes. Non sans grand mal, Henry V avait réussi à rassembler de nombreux hommes d’armes et une importante quantité de navires. Il débarque avec 12 000 soldats et assiège en cinq semaines la ville d’Harfleur en Normandie, espérant pouvoir rapidement reconquérir ce duché. Il apprend peu de temps après qu’une armée royale est placée à Rouen et décide alors de faire route jusque Calais, devenue anglaise en 1347.

L’armée française n’est pas dupe et découvre rapidement que l’ennemi fait retraite vers le nord, elle décide de le suivre dans l’espoir de le prendre au piège. Avec beaucoup de difficultés, les troupes anglaises réussissent à travers la Picardie à atteindre Voyennes (entre Saint-Quentin et Amiens) le 19 octobre 1415. Cinq jours plus tard, les anglais apprennent que l’armée française a établi son campement non loin d’eux, entre le village d’Azincourt et le bois de Tramecourt (Pas-de-Calais). De nouvelles négociations ont lieu le matin du 25 octobre 1415 mais aucune ne satisfait les deux partis, la bataille est alors inévitable.

Une bataille sanglante

Après d’ultimes négociations en vain, les deux armées se préparent à la bataille. Côté anglais, on compte près de 9000 combattants dont 7632 archers et 1643 hommes d’armes, selon l’estimation d’Anne Curry dans son ouvrage Azincourt, a new history, s’appuyant sur les informations livrées par le Chronique de Ruisseauville, contemporaine de la bataille. Henri V se place à la tête de ses troupes.

Du côté de l’armée française, il n’y pas de chef bien défini, mais en avant-garde, ont pris place tous les grands seigneurs du royaumes avec près de 3000 combattants, commandés eux aussi par de grands noms : Jean II Le Meingre (1364-1421), maréchal de France (dit aussi maréchal de Boucicaut), le connétable Charles d’Albret (1368-1415) ou encore le duc Charles Ier d’Orléans (1394-1465). Au centre, se trouve la garde principale avec 4000 hommes d’armes en armure, puis en arrière garde, 4100 soldats et hommes de trait (archers et arbalétriers) de basse condition.



Après de longues heures d’attente, le roi d’Angleterre décide de faire avancer son armée pour que les français soient à portée de flèche. Une pluie de flèches s’abat donc sur l’avant garde qui répond par une charge de cavalerie menée par le sieur Charles d’Albret, mais le terrain boueux est devenu impraticable, empêchant l’armée d’avancer et d’atteindre les lignes ennemies. Ce problème de terrain et le manque d’organisation causa beaucoup de tort aux français. Malgré de nombreux assauts, beaucoup sont tués et sont faits prisonniers dans le bois de Tramecourt. Pensant qu’une nouvelle tentative se prépare dans l’après-midi dans le camp français, Henry V décide de faire exécuter grand nombre de captifs sur place, les plus importants étant emmenés avec eux.

La majorité des combattants de l’arrière garde vont s’enfuir et laisser derrière eux les blessés et le matériel amené sur place. La bataille est déclarée terminée vers 17h.


©Gallica-BNF
La bataille d'Azincourt, illustrant la chronique d'Enguerrand de Monstrelet, f.208, Brugge ?, vers 1470-1480
©Gallica-BNF
La bataille d'Azincourt, issue du Manuscrit de Martial d'Auvergne, "Les Vigiles de Charles VII", vers 1484, BNF
©Gallica-BNF
La bataille d'Azincourt, issue l'Abrégé de la chronique d'Enguerrand de Monstrelet, XVe siècle, BNF

Les anglais ont triomphé des français, alors que ceux-ci étaient bien supérieur en nombre, malheureusement les conditions climatiques ont rendu le terrain impraticable et aucun chef précis n’avait été désigné pour commander l’ensemble de la troupe. On compte 6500 morts français ainsi que 2000 chevaux, alors que du coté anglais, on estime les pertes à 1000 morts. Les cadavres français laissés sur place sont rapidement dépouillés de leurs effets personnels par les anglais et les paysans qui ont assisté au triste spectacle. Il faut attendre trois jours pour que l’on daigne les enterrer. Les grands princes et noms de la chevalerie française sont inhumés dans les églises des environs, les soldats dont les corps ont été identifiés sont renvoyés aux familles et pour les inconnus, cinq fosses ont été creusées pour recevoir les corps de 1200 hommes chacune, comme il est rapporté dans la Chronique de Ruisseauville : en effet, il « avint adont que Loys de Luxembourg évêque de terrienne fit bénir la plache et le lieu ou les batailles avaient été, accompagnies de l’abbet de Blangies et fist la faire cinq sépultures en chascune sepulture fit enfouir 1200 hommes ou plus a ses couts et frais. »

À l’issue de cette bataille dont Henri V sort victorieux, le traité de Troyes, signé en 1420, prévoit qu’à la mort de Charles VI, la couronne reviendrait au roi d’Angleterre pour qu’il devienne le nouveau roi de France. Pourtant, celui-ci mourut quelques mois avant le monarque français. Il n’empêche que ce traité fit couler beaucoup d’encre car il envenima les liens entre la France et l’Angleterre.


Le site actuel et le Centre Azincourt 1415

De nos jours, il ne reste plus rien du champ de bataille, morcelé en plusieurs plaines agricoles. Néanmoins des stèles commémoratives ont été installées en 2015, à l’occasion des 600 ans de la bataille. Simples et joliment gravées, elles rendent hommage à ces gens d’armes français et anglais qui ont combattu vaillamment, ainsi qu’à ceux qui n’ont pas eu de tombes. Une stèle rend également hommage à Gallois de Fougières, prévôt des Maréchaux, considéré comme le premier « gendarme » tombé au combat. Également une tour de guet a été construite pour permettre aux curieux d’avoir un beau point de vue sur le champ de bataille.


©Louise Vandeweghe
Stèle honorant tous les soldats tués sur le champ de bataille d'Azincourt

©Genz d'armes 1415
Stèle en hommage à Gallois de Fougières

Le centre Azincourt 1415 est un lieu d’histoire mais aussi de mémoire. Il se veut de commémorer cette célèbre bataille et rendre hommage à ces hommes tués au combat. Dès l’entrée du parcours, ont été inscrits les 531 noms de chevaliers français parvenus jusqu’à nous.

Ce musée est aussi le vecteur de l’héritage historique et culturel que nous a transmis le Moyen Âge et la guerre de Cent Ans, plusieurs sujets sont traités de la bataille à l’habillement et aux habitudes alimentaires de ce début XVème.

Il a été fondé en juin 2001 en tant que Centre Historique Médiéval d’Azincourt puis est agrandi en 2005. Après quelques mois de travaux, le nouveau centre, rebaptisé Centre Azincourt 1415, propose une scénographie totalement remaniée qui permet au visiteur de s’immerger dans la bataille et dans la vie d’un homme d’armes, grâce à la restitution d’équipements militaires fin XIV-début XVe siècle, de jeux interactifs et ludiques abordant plusieurs champs thématiques (guerre, vie économique et social, l’alimentation…), de contenus audios riches animés par Christophe Gillot, directeur du Centre, Bertrand Schnerb, historien médiéviste spécialisé dans l’histoire de l’État Bourguignon aux XIV et XVe siècles et Anne Curry, éminente historienne anglaise. De nombreux panneaux explicatifs et sources iconographiques contemporaines de la bataille, invitent chacun à se plonger au cœur du XVe siècle, époque fastueuse du Moyen Âge tardif.



=> Le centre Azincourt 1415 est ouvert toute l’année, sauf le mardi, de 10h à 17h30

Pour plus de renseignements n’hésitez pas à consulter le site officiel : http://azincourt1415.com/accueil

Office de Tourisme des 7 Vallées : https://www.7valleesternoistourisme.com/fr/

Si vous êtes passionné par la guerre de Cent-Ans, le musée de Crécy-en-Ponthieu commémorant la célèbre bataille de Crécy en 1346, se situe à 40 min au sud d’Azincourt.



Quelques sources contemporaines de la bataille pour égailler votre curiosité :

Martial d’Auvergne (1430-1508), Les Vigiles de Charles VII, 1484-1485 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b105380390.image

Enguerrand de Monstrelet (vers 1400-1453), Chronique d’Enguerrand de Monstrelet, 1470-1480 ? : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k104835p.image

Chronique du religieux de Saint-Denys, Tome VIII (1415-1418) concernant le règne de Charles VI (non numérisé sur Gallica- BNF)




 
 
 

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