La Déesse, gardienne de la Grand'Place de Lille
- Lézard Amusé
- 27 févr. 2020
- 3 min de lecture
Chaque lillois-e a déjà vu ou observé, en passant par la Grand'Place, cette fière dame perchée sur sa colonne. Vous vous êtes peut-être déjà questionné-e-s sur son origine, sur ce qu'elle peut représenter pour la ville ; ou peut-être n'y avez-vous tout bonnement jamais prêté attention (et ce n'est pas grave !).
Aujourd'hui, Lézard Amusé va tenter de répondre à quelques questions que vous avez pu vous poser sur cette fameuse déesse !

Situé au centre de la place du Général-de-Gaulle, dite Grand'Place, le monument se compose d'une fontaine entourant le socle de la colonne. Cette base est flanquée de plaques gravées. Du socle s'élève la colonne cannelée (c'est-à-dire qu'elle est parcourue tout du long de sillons ou moulures verticales), faite en granit. Enfin, en haut siège la Déesse réalisée en bronze.
De quand date cet ensemble et pourquoi a-t-il été commandé par la ville ?
La colonne est née d'une commande de la ville en 1842, à l'occasion du Cinquantenaire du siège autrichien de 1792. Pendant le siège, la ville a largement été bombardée mais elle a fini par se relever et se reconstruire.
Le sculpteur Charles Benvignat (1805-1877) en a eu la charge. Il devait donc réaliser un monument commémoratif pour ce qui représente le cœur de la cité : la Grand'Place. Le monument a été inauguré le 8 octobre 1845.
Qui est le sculpteur de la Déesse ?
Théophile Bra (1797-1863), sculpteur douaisien, a été choisi pour la réalisation de la Déesse. Il a repris un modèle qu'il avait élaboré pour un projet mené par Jean-Nicolas Huyot (1780-1840) en 1830 concernant l'arc de Triomphe de Paris dessiné sur les plans de Jean-François Chalgrin (1739-1811).
Huyot souhaitait que 36 allégories représentant les principales villes de France surmontent l'arc. Son projet a finalement été abandonné à cause de sa trop grande ambition.
Bra a finalement offert à la ville de Lille son modèle.

Si l'envie vous prend, vous pouvez aller admirer quelques œuvres de Théophile Bra dans la galerie des sculptures du Palais des Beaux-Arts de Lille !
Une ode au patriotisme lillois ?
Le but d'une telle oeuvre était donc de symboliser la résistance des Lillois face aux troupes autrichiennes.

La statue a été baptisée « déesse » en raison de sa tunique et de sa couronne crénelée qui rappellent les représentations antiques, notamment de la République romaine ; mais aussi pour son air fier et déterminé.
Le sculpteur a cherché à reproduire un certain "type flamand". En somme il a doté sa sculpture des caractéristiques communes, stéréotypes qui régissent l'image des femmes de la région à l'époque : un corps robuste et puissant, pour rappeler le courage, la fécondité des flamandes mais aussi la fertilité du territoire pour lequel elles travaillent sans relâche.

Sa main gauche désigne la réplique du maire de Lille refusant la reddition de la ville à l'Autriche, gravée sur la face du socle :
« Nous venons de renouveler notre serment d'être fidèle à la Nation, de maintenir la Liberté et l'Égalité ou de mourir à notre poste. Nous ne sommes pas des parjures. »
Tandis que de l’autre main, elle tient un boutefeu servant à déclencher la charge d’un canon, comme une réponse à l'envahisseur.
L'anecdote courte
Le sculpteur aurait donné à sa Déesse les traits du visage de l’épouse du maire de Lille de l'époque (de 1834 à 1848), Mme Bigo-Danel.
C'est haut, non ?
Le monument mesure 15,50 mètres de haut ; la colonne mesure 12,51 mètres. La statue, quant à elle, fait un peu plus de 3 mètres de haut. Ce n'est pas pour rien qu'on dit que la Déesse veille sur la ville tant elle surplombe la place !
Et finalement ?
La déesse a été (heureusement) préservée sous l’occupation allemande pendant la Première Guerre mondiale. Elle a échappé de justesse aux collectes des monuments en bronze de la ville, destinés à être fondus. Le monument a tout de même perdu ses 4 mortiers autrichiens qui ornaient la base de la colonne.
A partir de 1989, des travaux sont réalisés sur la place et la fontaine ainsi que son large bassin circulaire y sont ajoutés.
Et voilà, la Déesse n'a désormais plus de secrets pour vous !
Toutes les illustrations de cet article sont des photographies personnelles.
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